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La risographie: de la photocopie à l’œuvre d’art.
— Avant tout, un peu d’histoire…
Le besoin en documents imprimés à petit tirage et à faible coût a fait germer dans la tête du japonais Noboru Hayama l’idée d’inventer une machine capable de produire des imprimés «maison» de manière simple. Il invente alors la machine idéale («riso» en japonais signifie «idéal»). Nous sommes alors en 1946. Le système se développe et les premières machines sont commercialisées. La risographie part à la conquête du monde.
La risographie est l’exemple type d’un détournement de la fonction originelle d’un outil, en témoigne la créativité dont ont fait preuve les artistes opportunistes qui en ont exploité les possibilités.
— Entre sérigraphie et photocopie
Techniquement parlant, l’impression «riso» est un procédé de duplication automatisé à jet d’encre à froid. On peut parler d’un croisement entre la sérigraphie et la photocopie. Le procédé d’impression fonctionne par couche de couleur, imprimée une à une, et se superposant. L’ordre d’impression a son importance. Ce procédé se base sur le principe du modèle (aussi appelé master), un rouleau de papier d’acétate et de cire. Un modèle correspond à une couleur choisie. Il y a ainsi autant de modèles à créer que de couleurs à imprimer.
Cela se déroule comme suit: on fixe le tambour cylindrique dans lequel est introduite la cartouche d’encre, on place l’élément à reproduire sur la vitre d’exposition, celui-ci est scanné et appliqué sur le modèle, la feuille de papier est avalée par la machine et l’encre est appliquée dessus.
Comme pour la sérigraphie, la préparation du document final doit tenir compte du résultat souhaité et du nombre de couleurs, qui doivent être séparées en éléments distincts pour créer les modèles.
— Risomania
Vu ses avantages, ce sytème a connu un engouement particulier dans des établissements comme les écoles et les administrations. Sa première utilisation fut donc la reproduction de documents textes.
Ensuite, des créateurs y ont vu une potentialité artistique hors du commun et lui ont trouvé une seconde destination.
La risographie a rapidement suscité l’intérêt auprès des métiers des arts graphiques : son rendu proche de la sérigraphie, sa technique d’utilisation automatisée et rapide, son coût de revient compétitif, et surtout cette spécificité qui rend cette impression proche de l’artisanat: un rendu des couleurs unique, les textures de papier recommandées (du non couché, évidemment), son côté écologique (les encres sont sans solvants), mais aussi un repérage pas toujours parfait, un séchage lent, la présence d’une trame, donnent un résultat imprimé si singulier.
Symptômes du renouveau qu’elle suscite, de nombreux artistes, studios graphiques et autres créateurs plébiscitent cette technique pour la réalisation d’affiches, de dépliants, de cartons d’invitation, de catalogues, de magazines, d’imprimés d’art ou encore de couvertures d’album. Des collectifs naissent, des réseaux s’organisent.
Pour preuve, lors de l’édition 2016 du festival international de la bande dessinée à Angoulême, un atelier de quatre jours a été consacré à la risographie, rassemblant une foule de curieux autour d’une phalange d’auteurs et de l’éditeur anglais Breakdown Press.
Ressources :
Author
Etienne Lens
Tags
imprimerie risographie arts graphiques
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